Le samedi 14 janvier 2012, environ 150 personnes se sont retrouvées à Vincennes pour aller manifester contre les centres de rétention. La veille, six personnes sans-papiers avaient été condamnées en appel à des peines allant de 6 à 30 mois de prison ferme suite à la révolte incendiaire qui, le 22 juin 2008, a abouti à la destruction de ce même centre de rétention.
Peu après le départ de la manif, qui s’installe sur toute la largeur d’une avenue, quelques flics en tenue anti-émeute essayent tant bien que mal de barrer le passage, en vain. Les manifestants les débordent et continuent leur marche pour se rapprocher au plus près possible de la prison pour étrangers, tandis que les flics se mettent à courir sur les côtés pour se regrouper plus loin et stopper l’avancée du cortège.
Une première halte d’une demi-heure sur le côté du centre de rétention situé le long de l’autoroute, le temps de s’époumoner: «Feu, feu, aux centres de rétention ! Feu à toutes les prisons !», «Flics, matons, assassins !», «Liberté pour tous, avec ou sans papiers !», «Pierre par pierre, mur par mur, détruisons toutes les prisons !», cris auxquels répondent les retenus. Pas mal d’enthousiasme, et après quelques retentissants pétards et quelques fumigènes lâchés, les manifestants repartent dans l’autre sens, suivis par une ligne de policiers.
La manif contourne la prison pour tenter de s’engouffrer sur le parking séparant le CRA de l’hippodrome. Les flics réagissent vite et empêchent la progression, entraînant au passage quelques coups de part et d’autre, puis barrent les voies de sortie. Alors que les slogans continuent de résonner, la nasse policière se resserre progressivement, tandis que des civils visionnent les vidéos prises par leurs collègues afin de trier les personnes à extraire et à arrêter en priorité. Les flics de la bac commencent alors de brutales entrées dans la nasse pour attraper les manifestants ciblés, à coup de gazeuses et de matraques. Malgré la solidarité et la détermination des autres, trois personnes sont extraites et embarquées à part.
Elles ont été placées en garde-à-vue, sous les chefs d’inculpation : «participation à un attroupement armé, violences sur agents et dégradations de biens privés.» Le reste du groupe, une centaine de personnes à ce moment-là, a été embarqué dans deux cars et emmené dans le nouveau commissariat situé rue de l’Évangile dans le XVIIIe arrondissement [commissariat dont nous avions parlé dans le texte «La pantoufle et le marteau» dans Lucioles n° 5]. Tout au long du transfert des discussions ont lieu pour imposer aux policiers de pouvoir sortir ensemble et de ne donner qu’oralement les identités, ce qui sera obtenu. Tout le monde se retrouve ensuite parqué dans une cour extérieure entourée de barbelés et séparée en deux. Ce commissariat, qui abrite la direction de la police ferroviaire, a déjà servi pour des opérations de contrôle d’identité massives (rafles, manifestation…).
Après cinq heures aux mains de la police, les manifestants peuvent sortir. Les trois personnes placées en garde-à-vue sont passées en comparution immédiate au TGI de paris le 16 janvier, puis ont été remises en «liberté» sous contrôle judiciaire, avec une date de renvoi en jugement au 27 février. A noter qu’un rassemblement de solidarité s’est tenu devant le tribunal, lui aussi dispersé par les keufs.