Cela fait des années que dure le manège quotidien des flics contre les vendeurs à la sauvette de la tour Eiffel et de ses alentours. Une majorité de sénégalais, qui ne font que vendre des bibelots insignifiants pour touristes (mini tour Eiffel et autres babioles etc.) qui ont pris l’habitude de courir plus vite que les flics et de les repérer avec une certaine expertise et de façon solidaire entre vendeurs. Lorsqu’ils sont interpellés, la marchandise est confisquée et détruite, parfois un petit tabassage au poste. Mais malgré les 12 000 contraventions par an en moyenne, la police n’est jamais parvenue à enrayer le phénomène. Alors, le 29 août, l’État a décidé de se lancer dans une vaste opération coup-de-poing, un coup de filet massif perpétré par plus de 200 flics de diverses brigades. Il y aura ce jour là, plus de cinquante interpellations et une bonne centaine de sacs de marchandises saisis. Ce qui au final, ne représente pas beaucoup plus que les chiffres quotidiens avancés par la préfecture, ce qui ne l’empêchera pas de se vanter de cette opération qui vise surtout au final, à arrêter, harceler et parfois expulser des sans-papiers. L’opération était prévue à 14h30, mais dès 14 heures, des centaines de vendeurs avaient pour la plupart déjà pris la poudre d’escampette. Mais, contrairement aux médias-poubelle, il nous semble important de parler de ce qui est arrivé une dizaine de jours avant cette opération.
Le 19 août, comme chaque jour, les flics harcèlent les vendeurs. Un jeune est pris en chasse par les flics. Malheureusement, l’issue de cette course-poursuite est tragique puisque ce jeune sénégalais finira électrocuté sur les voies du métro Trocadero en tentant d’échapper aux flics. Il sera placé dans un coma artificiel, puis en réanimation artificielle. Il a survécu, difficilement. Suite à cette nouvelle tentative d’assassinat de la police, une assemblée générale sera tenue pour parler du harcèlement policier entre plus de 300 vendeurs exclusivement sénégalais, ce que nous déplorons: le harcèlement policier n’est pas que l’affaire des sénégalais, mais de tous les pauvres. D’autant plus que les vendeurs d’origine sénégalaise ne sont pas les seuls, d’autres viennent d’Europe Centrale ou du sous-continent indien. Mais nous avons déjà largement dit ce que nous pensons du communautarisme et de la concurrence « ethnique » dans ce numéro comme dans les précédents.
Ce qui est ressorti de cette assemblée, c’est avant tout la colère. Communautarisme oblige, le consul du Sénégal à Paris ne se gênera pas pour appeler au calme et « rassurer ». Une enquête a été ouverte par le procureur de Paris, d’accord, mais en quoi cela pourrait-il bien rassurer ou même changer quoi que ce soit ? Il n’en sera rien, et le 21 août, une centaine de vendeur prennent leurs propres initiatives et s’affrontent directement à la police aux environs de 14h, à coup de pierres et de bouteilles. Trois policiers ont été « blessés légèrement, notamment aux jambes » par des projectiles. Et une dizaine d’interpellations a eu lieu. Tout a commencé lorsqu’un petit groupe de vendeurs a pris l’initiative d’attaquer une patrouille de flics, c’est alors qu’une centaine de vendeurs a fait front, en solidarité avec cette initiative, avant de se disperser pour éviter la vengeance d’État.
Dans ce contexte, le directeur de cabinet du préfet de police, Jean-Louis Fiamenghi, s’est rendu sur place avec pour seule réponse à la colère, l’annonce d’un énième durcissement : « Chaque vendeur à la sauvette sera dorénavant systématiquement interpellé et il n’y aura plus aucune tolérance pour ces ventes ». « Nous avons réalisé 550 gardes à vue ces derniers mois », précise-t-on au commissariat du VIIe. La préfecture a par ailleurs renforcé ses effectifs. En plus des traditionnels patrouilleurs à VTT ou des agents de la BAC, les CRS sont appelés à la rescousse depuis mars dernier.
La préfecture a déjà bénéficié d’un renforcement de la législation en mars dernier. Depuis la loi Loppsi 2, les vendeurs peuvent être emmenés en garde à vue et la nouvelle loi permet de les incarcérer. Six mois d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende.